21  Régression logistique binaire

Dans le chapitre précédent (Chapitre 20), nous avons abordé la régression linéaire pour les variables continues. Pour analyser une variable catégorielle, il est nécessaire d’avoir recours à d’autres types de modèles. Les modèles linéaires généralisés (generalized linear models ou GLM en anglais) sont une généralisation de la régression linéaire grâce à l’utilisation d’une fonction de lien utilisée pour transformer la variable à expliquer et pouvoir ainsi retomber sur un modèle linéaire classique. Il existe de multiples fonctions de lien correspondant à tout autant de modèles. Par exemple, on pourra utiliser un modèle de Poisson pour une variable entière positive ou un modèle d’incidence.

Pour une variable binaire (c’est-à-dire du type oui / non ou vrai / faux), les modèles les plus courants utilisent les fonctions de lien probit ou logit, cette dernière fonction correspondent à la régression logistique binaire (modèle logit). Comme pour la régression linéaire, les variables explicatives peuvent être continues et/ou catégorielles.

21.1 Préparation des données

Dans ce chapitre, nous allons encore une fois utiliser les données de l’enquête Histoire de vie, fournies avec l’extension questionr.

data(hdv2003, package = "questionr")
d <- hdv2003

À titre d’exemple, nous allons étudier l’effet de l’âge, du sexe, du niveau d’étude, de la pratique religieuse et du nombre moyen d’heures passées à regarder la télévision par jour sur la probabilité de pratiquer un sport.

En premier lieu, il importe de vérifier, par exemple avec labelled::look_for(), que notre variable d’intérêt (ici sport) est correctement codée, c’est-à-dire que la première modalité correspondent à la référence (soit ne pas avoir vécu l’évènement d’intérêt) et que la seconde modalité corresponde au fait d’avoir vécu l’évènement.

library(labelled)
d |> look_for("sport")
 pos variable label col_type missing values
 19  sport    —     fct      0       Non   
                                     Oui   

Dans notre exemple, la modalité Non est déjà la première modalité. Il n’y a donc pas besoin de modifier notre variable.

Il faut également la présence éventuelle de données manquantes (NA)1. Les observations concernées seront tout simplement exclues du modèle lors de son calcul. Ce n’est pas notre cas ici.

  • 1 Pour visualiser le nombre de données manquantes (NA) de l’ensemble des variables d’un tableau, on pourra avoir recours à questionr::freq.na().

  • Astuce

    Alternativement, on pourra aussi coder notre variable à expliquer sous forme booléenne (FALSE / TRUE) ou numériquement en 0/1.

    Il est possible d’indiquer un facteur à plus de deux modalités. Dans une telle situation, R considérera que tous les modalités, sauf la modalité de référence, est une réalisation de la variable d’intérêt. Cela serait correct, par exemple, si notre variable sport était codée ainsi : Non, Oui, de temps en temps, Oui, régulièrement. Cependant, afin d’éviter tout risque d’erreur ou de mauvaise interprétation, il est vivement conseillé de recoder au préalable sa variable d’intérêt en un facteur à deux modalités.

    La notion de modalité de référence s’applique également aux variables explicatives catégorielles. En effet, dans un modèle, tous les coefficients sont calculés par rapport à la modalité de référence (cf. Section 20.2). Il importe donc de choisir une modalité de référence qui fasse sens afin de faciliter l’interprétation. Par ailleurs, ce choix doit dépendre de la manière dont on souhaite présenter les résultats (le data storytelling est essentiel). De manière générale on évitera de choisir comme référence une modalité peu représentée dans l’échantillon ou bien une modalité correspondant à une situation atypique.

    Prenons l’exemple de la variable sexe. Souhaite-t-on connaitre l’effet d’être une femme par rapport au fait d’être un homme ou bien l’effet d’être un homme par rapport au fait d’être une femme ? Si l’on opte pour le second, alors notre modalité de référence sera le sexe féminin. Comme est codée cette variable ?

    d |> look_for("sexe")
     pos variable label col_type missing values
     3   sexe     —     fct      0       Homme 
                                         Femme 

    La modalité Femme s’avère ne pas être la première modalité. Nous devons appliquer la fonction forcats::fct_relevel() ou la fonction stats::relevel() :

    library(tidyverse)
    d <- d |> 
      mutate(sexe = sexe |> fct_relevel("Femme"))
    d$sexe |> questionr::freq()
             n  % val%
    Femme 1101 55   55
    Homme  899 45   45

    Données labellisées

    Si l’on utilise des données labellisées (voir Chapitre 12), nos variables catégorielles seront stockées sous la forme d’un vecteur numérique avec des étiquettes. Il sera donc nécessaire de convertir ces variables en facteurs, tout simplement avec labelled::to_factor() ou labelled::unlabelled().

    Les variables age et heures.tv sont des variables quantitatives. Il importe de vérifier qu’elles sont bien enregistrées en tant que variables numériques. En effet, il arrive parfois que dans le fichier source les variables quantitatives soient renseignées sous forme de valeur textuelle et non sous forme numérique.

    d |> look_for("age", "heures")
     pos variable  label col_type missing values
     2   age       —     int      0             
     20  heures.tv —     dbl      5             

    Nos deux variables sont bien renseignées sous forme numérique (respectivement des entiers et des nombres décimaux).

    Cependant, l’effet de l’âge est rarement linéaire. Un exemple trivial est par exemple le fait d’occuper un emploi qui sera moins fréquent aux jeunes âges et aux âges élevés. Dès lors, on pourra transformer la variable age en groupe d’âges (et donc en variable catégorielle) avec la fonction cut() (cf. Section 9.4) :

    d <- d |> 
      mutate(
        groupe_ages = age |>
          cut(
            c(18, 25, 45, 65, 99),
            right = FALSE,
            include.lowest = TRUE,
            labels = c("18-24 ans", "25-44 ans",
                       "45-64 ans", "65 ans et plus")
          )
      )
    d$groupe_ages |> questionr::freq()
                     n    % val%
    18-24 ans      169  8.5  8.5
    25-44 ans      706 35.3 35.3
    45-64 ans      745 37.2 37.2
    65 ans et plus 380 19.0 19.0

    Jetons maintenant un oeil à la variable nivetud :

    d$nivetud |> questionr::freq()
                                                                      n    % val%
    N'a jamais fait d'etudes                                         39  2.0  2.1
    A arrete ses etudes, avant la derniere annee d'etudes primaires  86  4.3  4.6
    Derniere annee d'etudes primaires                               341 17.0 18.1
    1er cycle                                                       204 10.2 10.8
    2eme cycle                                                      183  9.2  9.7
    Enseignement technique ou professionnel court                   463 23.2 24.5
    Enseignement technique ou professionnel long                    131  6.6  6.9
    Enseignement superieur y compris technique superieur            441 22.0 23.4
    NA                                                              112  5.6   NA

    En premier lieu, cette variable est détaillée en pas moins de huit modalités dont certaines sont peu représentées (seulement 39 individus soit 2 % n’ont jamais fait d’études par exemple). Afin d’améliorier notre modèle logistique, il peut être pertinent de regrouper certaines modalités (cf. Section 9.3) :

    d <- d |> 
      mutate(
        etudes = nivetud |> 
          fct_recode(
          "Primaire" = "N'a jamais fait d'etudes",
          "Primaire" = "A arrete ses etudes, avant la derniere annee d'etudes primaires",
          "Primaire" = "Derniere annee d'etudes primaires",
          "Secondaire" = "1er cycle",
          "Secondaire" = "2eme cycle",
          "Technique / Professionnel" = "Enseignement technique ou professionnel court",
          "Technique / Professionnel" = "Enseignement technique ou professionnel long",
          "Supérieur" = "Enseignement superieur y compris technique superieur"
        )    
      )
    d$etudes |> questionr::freq()
                                n    % val%
    Primaire                  466 23.3 24.7
    Secondaire                387 19.4 20.5
    Technique / Professionnel 594 29.7 31.5
    Supérieur                 441 22.0 23.4
    NA                        112  5.6   NA

    Notre variable comporte également 112 individus avec une valeur manquante. Si nous conservons cette valeur manquante, ces 112 individus seront, par défaut, exclus de l’analyse. Ces valeurs manquantes n’étant pas négligeable (5,6 %), nous pouvons également faire le choix de considérer ces valeurs manquantes comme une modalité supplémentaire. Auquel cas, nous utiliserons la fonction forcats::fct_na_value_to_level()  :

    d$etudes <- d$etudes |> 
      fct_na_value_to_level("Non documenté")

    Enfin, pour améliorer les différentes sorties (tableaux et figures), nous allons ajouter des étiquettes de variables (cf. Chapitre 11) avec labelled::set_variable_labels().

    d <- d |> 
      set_variable_labels(
        sport = "Pratique un sport ?",
        sexe = "Sexe",
        groupe_ages = "Groupe d'âges",
        etudes = "Niveau d'études",
        relig = "Rapport à la religion",
        heures.tv = "Heures de télévision / jour"
      )
    Code récapitulatif (préparation des données)
    data(hdv2003, package = "questionr")
    d <-
      hdv2003 |> 
      mutate(
        sexe = sexe |> fct_relevel("Femme"),
        groupe_ages = age |>
          cut(
            c(18, 25, 45, 65, 99),
            right = FALSE,
            include.lowest = TRUE,
            labels = c("18-24 ans", "25-44 ans",
                       "45-64 ans", "65 ans et plus")
          ),
        etudes = nivetud |> 
          fct_recode(
            "Primaire" = "N'a jamais fait d'etudes",
            "Primaire" = "A arrete ses etudes, avant la derniere annee d'etudes primaires",
            "Primaire" = "Derniere annee d'etudes primaires",
            "Secondaire" = "1er cycle",
            "Secondaire" = "2eme cycle",
            "Technique / Professionnel" = "Enseignement technique ou professionnel court",
            "Technique / Professionnel" = "Enseignement technique ou professionnel long",
            "Supérieur" = "Enseignement superieur y compris technique superieur"
        ) |> 
        fct_na_value_to_level("Non documenté")  
      ) |> 
      set_variable_labels(
        sport = "Pratique un sport ?",
        sexe = "Sexe",
        groupe_ages = "Groupe d'âges",
        etudes = "Niveau d'études",
        relig = "Rapport à la religion",
        heures.tv = "Heures de télévision / jour"
      )

    21.2 Statistiques descriptives

    Avant toute analyse multivariée, il est toujours bon de procéder à une analyse descriptive bivariée simple, tout simplement avec gtsummary::tbl_summary(). Ajoutons quelques tests de comparaison avec gtsummary::add_p(). Petite astuce : gtsummary::modify_spanning_header() permet de rajouter un en-tête sur plusieurs colonnes.

    library(gtsummary)
    theme_gtsummary_language("fr", decimal.mark = ",", big.mark = " ")
    d |> 
      tbl_summary(
        by = sport,
        include = c(sexe, groupe_ages, etudes, relig, heures.tv)
      ) |>
      add_overall(last = TRUE) |> 
      add_p() |> 
      bold_labels() |> 
      modify_spanning_header(
        update = all_stat_cols() ~ "**Pratique un sport ?**"
      )
    Caractéristique Pratique un sport ? p-valeur2
    Non, N = 1 2771 Oui, N = 7231 Total, N = 2 0001
    Sexe <0,001
        Femme 747 (58%) 354 (49%) 1 101 (55%)
        Homme 530 (42%) 369 (51%) 899 (45%)
    Groupe d'âges <0,001
        18-24 ans 58 (4,5%) 111 (15%) 169 (8,5%)
        25-44 ans 359 (28%) 347 (48%) 706 (35%)
        45-64 ans 541 (42%) 204 (28%) 745 (37%)
        65 ans et plus 319 (25%) 61 (8,4%) 380 (19%)
    Niveau d'études <0,001
        Primaire 416 (33%) 50 (6,9%) 466 (23%)
        Secondaire 270 (21%) 117 (16%) 387 (19%)
        Technique / Professionnel 378 (30%) 216 (30%) 594 (30%)
        Supérieur 186 (15%) 255 (35%) 441 (22%)
        Non documenté 27 (2,1%) 85 (12%) 112 (5,6%)
    Rapport à la religion 0,14
        Pratiquant regulier 182 (14%) 84 (12%) 266 (13%)
        Pratiquant occasionnel 295 (23%) 147 (20%) 442 (22%)
        Appartenance sans pratique 473 (37%) 287 (40%) 760 (38%)
        Ni croyance ni appartenance 239 (19%) 160 (22%) 399 (20%)
        Rejet 60 (4,7%) 33 (4,6%) 93 (4,7%)
        NSP ou NVPR 28 (2,2%) 12 (1,7%) 40 (2,0%)
    Heures de télévision / jour 2,00 (1,00 – 3,00) 2,00 (1,00 – 3,00) 2,00 (1,00 – 3,00) <0,001
        Manquant 2 3 5
    1 n (%); Médiane (EI)
    2 test du khi-deux d'indépendance; test de Wilcoxon-Mann-Whitney
    Table 21.1: Pratique d’un sport selon différentes variables explicatives (analyse bivariée)

    21.3 Calcul de la régression logistique binaire

    La spécification d’une régression logistique se fait avec stats::glm() et est très similaire à celle d’une régression linéaire simple (cf. Section 20.3) : on indique la variable à expliquer suivie d’un tilde (~) puis des variables explicatives séparées par un plus (+)2. Il faut indiquer à glm() la famille du modèle souhaité : on indiquera simplement family = binomial pour un modèle logit3.

  • 2 Il est possible de spécifier des modèles plus complexes, notamment avec des effets d’interaction, qui seront aborder plus loin (cf. Chapitre 24).

  • 3 Pour un modèle probit, on indiquera family = binomial("probit").

  • mod <- glm(
      sport ~ sexe + groupe_ages + etudes + relig + heures.tv,
      family = binomial,
      data = d
    )

    Pour afficher les résultats du modèle, le plus simple est d’avoir recours à gtsummary::tbl_regression().

    mod |> 
      tbl_regression(intercept = TRUE) |> 
      bold_labels()
    Caractéristique log(OR)1 95% IC1 p-valeur
    (Intercept) -0,80 -1,4 – -0,17 0,014
    Sexe
        Femme
        Homme 0,44 0,23 – 0,65 <0,001
    Groupe d'âges
        18-24 ans
        25-44 ans -0,42 -0,87 – 0,03 0,065
        45-64 ans -1,1 -1,6 – -0,62 <0,001
        65 ans et plus -1,4 -1,9 – -0,85 <0,001
    Niveau d'études
        Primaire
        Secondaire 0,95 0,57 – 1,3 <0,001
        Technique / Professionnel 1,0 0,68 – 1,4 <0,001
        Supérieur 1,9 1,5 – 2,3 <0,001
        Non documenté 2,2 1,5 – 2,8 <0,001
    Rapport à la religion
        Pratiquant regulier
        Pratiquant occasionnel -0,02 -0,39 – 0,35 >0,9
        Appartenance sans pratique -0,01 -0,35 – 0,34 >0,9
        Ni croyance ni appartenance -0,22 -0,59 – 0,16 0,3
        Rejet -0,38 -0,95 – 0,17 0,2
        NSP ou NVPR -0,08 -0,92 – 0,70 0,8
    Heures de télévision / jour -0,12 -0,19 – -0,06 <0,001
    1 OR = rapport de cotes, IC = intervalle de confiance
    Table 21.2: Facteurs associés à la pratique d’un sport (régression logistique binaire)

    21.4 Interpréter les coefficients

    L’intercept traduit la situation à la référence (i.e. toutes les variables catégorielles à leur modalité de référence et les variables continues à 0), après transformation selon la fonction de lien (i.e. après la transformation logit).

    Illustrons cela. Supposons donc une personne de sexe féminin, âgée entre 18 et 24 ans, de niveau d’étude primaire, pratiquante régulière et ne regardant pas la télévision (situation de réference). Seul l’intercept s’applique dans le modèle, et donc le modèle prédit que sa probabilité de faire du sport est de \(-0,80\) selon l’échelle logit. Retraduisons cela en probabilité classique avec la fonction logit inverse.

    logit_inverse <- binomial("logit") |> purrr::pluck("linkinv")
    logit_inverse(-0.80)
    [1] 0.3100255

    Selon le modèle, la probabilité que cette personne fasse du sport est donc de \(31\%\).

    Prenons maintenant une personne identique mais de sexe masculin. Nous devons donc considérer, en plus de l’intercept, le coefficient associé à la modalité Homme. Sa probabilité de faire du sport est donc :

    logit_inverse(-0.80 + 0.44)
    [1] 0.4109596

    Le coefficient associé à Homme est donc un modificateur par rapport à la situation de référence.

    Enfin, considérons que cette dernière personne regarde également la télévision 2 heures en moyenne par jour. Nous devons alors considérer le coefficient associé à la variable heures.tv et, comme il s’agit d’une variable continue, multiplier ce coefficient par 2, car le coefficient représente le changement pour un incrément de 1 unité.

    logit_inverse(-0.80 + 0.44 + 2 * -0.12)
    [1] 0.3543437

    Il est crucial de bien comprendre comment dans quels cas et comment chaque coefficient est utilisé par le modèle.

    Le package {breakdown} permet de mieux visualiser notre dernier exemple.

    individu3 <- d[1, ]
    individu3$sexe[1] <- "Homme"
    individu3$groupe_ages[1] <- "18-24 ans"
    individu3$etudes[1] <- "Primaire"
    individu3$relig[1] <- "Pratiquant regulier"
    individu3$heures.tv[1] <- 2
    library(breakDown)
    logit <- function(x) exp(x) / (1 + exp(x))
    plot(
      broken(mod, individu3, predict.function = betas),
      trans = logit
    ) +
      scale_y_continuous(
        labels = scales::label_percent(),
        breaks = 0:5/5,
        limits = c(0, 1)
      )

    Décomposition de la probabilité de faire du sport de l’individu 3

    21.5 La notion d’odds ratio

    L’un des intérêts de la régression logistique logit réside dans le fait que l’exponentiel des coefficients correspond à des odds ratio ou rapport des côtes en français.

    Astuce

    Pour comprendre la notion de côte (odd en anglais), on peut se référer aux paris sportifs. Par exemple, lorsque les trois quarts des parieurs parient que le cheval A va remporter la course, on dit alors que ce cheval à une côte de trois contre un (trois personnes parient qu’il va gagner contre une personne qu’il va perdre). Prenon un autre cheval : si les deux tiers pensent que le cheval B va perdre (donc un tiers pense qu’il va gagner), on dira alors que sa côte est de un contre deux (une personne pense qu’il va gagner contre deux qu’il va perdre).

    Si l’on connait la proportion ou probabilité p d’avoir vécu ou de vivre un événenement donné (ici gagner la course), la côte (l’odd) s’obtient avec la formule suivante : \(p/(1-p)\). La côte du cheval A est bien \(0,75/(1-0,75)=0,75/0,25=3\) est celle du cheval B \((1/3)/(2/3)=1/2=0,5\).

    Pour comparer deux côtes (par exemple pour savoir si le cheval A a une probabilité plus élevée de remporter la course que le cheval B, selon les parieurs), on calculera tout simplement le rapport des côtes ou odds ratio (OR) : \(OR_{A/B}=Odds_{A}/Odds_{B}=3/0,5=6\).

    Ce calcul peut se faire facilement dans R avec la fonction questionr::odds.ratio().

    questionr::odds.ratio(.75, 1/3)
    [1] 6

    L’odds ratio est donc égal à 1 si les deux côtes sont identiques, est supérieur à 1 si le cheval A une probabilité supérieure à celle du cheval B, et inférieur à 1 si c’est probabilité est inférieure.

    On le voit, par construction, l’odds ratio de B par rapport à A est l’inverse de celui de A par rapport à B : \(OR_{B/A}=1/OR_{A/B}\).

    Pour afficher les odds ratio il suffit d’indiquer exponentiate = TRUE à gtsummary::tbl_regression().

    mod |> 
      tbl_regression(exponentiate = TRUE) |> 
      bold_labels()
    Caractéristique OR1 95% IC1 p-valeur
    Sexe
        Femme
        Homme 1,55 1,26 – 1,91 <0,001
    Groupe d'âges
        18-24 ans
        25-44 ans 0,66 0,42 – 1,03 0,065
        45-64 ans 0,34 0,21 – 0,54 <0,001
        65 ans et plus 0,25 0,15 – 0,43 <0,001
    Niveau d'études
        Primaire
        Secondaire 2,59 1,77 – 3,83 <0,001
        Technique / Professionnel 2,86 1,98 – 4,17 <0,001
        Supérieur 6,63 4,55 – 9,80 <0,001
        Non documenté 8,59 4,53 – 16,6 <0,001
    Rapport à la religion
        Pratiquant regulier
        Pratiquant occasionnel 0,98 0,68 – 1,42 >0,9
        Appartenance sans pratique 0,99 0,71 – 1,40 >0,9
        Ni croyance ni appartenance 0,81 0,55 – 1,18 0,3
        Rejet 0,68 0,39 – 1,19 0,2
        NSP ou NVPR 0,92 0,40 – 2,02 0,8
    Heures de télévision / jour 0,89 0,83 – 0,95 <0,001
    1 OR = rapport de cotes, IC = intervalle de confiance
    Table 21.3: Facteurs associés à la pratique d’un sport (odds ratios)

    Pour une représentation visuelle, graphique en forêt ou forest plot en anglais, on aura tout simplement recours à ggstats::ggcoef_model().

    mod |> 
      ggstats::ggcoef_model(exponentiate = TRUE)

    Figure 21.1: Facteurs associés à la pratique d’un sport (forest plot)

    Note

    Lorsque l’on réalise un forest plot de coefficients exponentialisés tels que des odds ratios, une bonne pratique consiste à utiliser une échelle logarithmique. En effet, l’inverse d’un odds ratio de 2 est 0,5. Avec une échelle logarithmique, la distance entre 0,5 et 1 est égale à celle entre 1 et 2. Sur la figure précédente, vous pourrez noter que ggstats::ggcoef_model() applique automatiquement une échelle logarithmique lorsque exponentiate = TRUE.

    Quelques références : Forest Plots: Linear or Logarithmic Scale? ou encore Graphing Ratio Measures on Forest Plot.

    Mise en garde

    En rédigeant les résultats de la régression, il faudra être vigilant à ne pas confondre les odds ratios avec des prevalence ratios. Avec un odds ratio de 1,55, il serait tentant d’écrire que les hommes ont une probabilité 55% supérieure de pratique un sport que les femmes (toutes choses égales par ailleurs). Une telle formulation correspond à un prevalence ratio (rapport des prévalences en français) ou risk ratio (rapport des risques), à savoir diviser la probabilité de faire du sport des hommes par celle des femmes, \(p_{hommes}/p_{femmes}\). Or, cela ne correspond pas à la formule de l’odds ratio, à savoir \((p_{hommes}/(1-p_{hommes}))/(p_{femmes}/(1-p_{femmes}))\).

    Lorsque le phénomène étudié est rare et donc que les probabilités sont faibles (inférieures à quelques pour-cents), alors il est vrai que les odds ratio sont approximativement égaux aux prevalence ratios. Mais ceci n’est plus du tout vrai pour des phénomènes plus fréquents.

    21.6 Afficher les écarts-types plutôt que les intervalles de confiance

    La manière de présenter les résultats d’un modèle de régression varie selon les disciplines, les champs thématiques et les revues. Si en sociologie et épidémiologie on aurait plutôt tendance à afficher les odds ratio avec leur intervalle de confiance, il est fréquent en économétrie de présenter plutôt les coefficients brust et leurs écarts-types (standard deviation ou sd en anglais). De même, plutôt que d’ajouter une colonne avec les p valeurs, un usage consiste à afficher des étoiles de significativités à la droite des coefficients significatifs.

    Pour cela, on pourra personnaliser le tableau produit avec gtsummary::tbl_regression(), notamment avec gtsummary::add_significance_stars() pour l’ajout des étoiles de significativité, ainsi que gtsummary::modify_column_hide() et gtsummary::modify_column_unhide() pour afficher / masquer les colonnes du tableau produit4.

  • 4 La liste des colonnes disponibles peut être obtenues avec mod |> tbl_regression() |> purrr::pluck("table_body") |> colnames().

  • mod |> 
      tbl_regression() |> 
      add_significance_stars() |> 
      modify_column_hide(c("ci", "p.value")) |> 
      modify_column_unhide("std.error") |> 
      bold_labels()
    Caractéristique log(OR)1,2 ET2
    Sexe
        Femme
        Homme 0,44*** 0,106
    Groupe d'âges
        18-24 ans
        25-44 ans -0,42 0,228
        45-64 ans -1,1*** 0,238
        65 ans et plus -1,4*** 0,274
    Niveau d'études
        Primaire
        Secondaire 0,95*** 0,197
        Technique / Professionnel 1,0*** 0,190
        Supérieur 1,9*** 0,195
        Non documenté 2,2*** 0,330
    Rapport à la religion
        Pratiquant regulier
        Pratiquant occasionnel -0,02 0,189
        Appartenance sans pratique -0,01 0,175
        Ni croyance ni appartenance -0,22 0,193
        Rejet -0,38 0,286
        NSP ou NVPR -0,08 0,411
    Heures de télévision / jour -0,12*** 0,034
    1 *p<0.05; **p<0.01; ***p<0.001
    2 OR = rapport de cotes, ET = écart-type
    Table 21.4: Présentation économétrique des facteurs associés à la pratique d’un sport

    Les économistes pourraient préférer le package modelsummary à gtsummary. Ces deux packages ont un objectif similaire (la production de tableaux statistiques) mais abordent cet objectif avec des approches différentes. Il faut noter que modelsummary::modelsummary() n’affiche pas les modalités de référence, ni les étiquettes de variable.

    mod |> modelsummary::modelsummary(stars = TRUE)
     (1)
    (Intercept) −0.798*
    (0.324)
    sexeHomme 0.440***
    (0.106)
    groupe_ages25-44 ans −0.420+
    (0.228)
    groupe_ages45-64 ans −1.085***
    (0.238)
    groupe_ages65 ans et plus −1.381***
    (0.274)
    etudesSecondaire 0.951***
    (0.197)
    etudesTechnique / Professionnel 1.049***
    (0.190)
    etudesSupérieur 1.892***
    (0.195)
    etudesNon documenté 2.150***
    (0.330)
    religPratiquant occasionnel −0.022
    (0.189)
    religAppartenance sans pratique −0.007
    (0.175)
    religNi croyance ni appartenance −0.215
    (0.193)
    religRejet −0.384
    (0.286)
    religNSP ou NVPR −0.084
    (0.411)
    heures.tv −0.121***
    (0.034)
    Num.Obs. 1995
    AIC 2236.2
    BIC 2320.1
    Log.Lik. −1103.086
    F 21.691
    RMSE 0.43
    + p < 0.1, * p < 0.05, ** p < 0.01, *** p < 0.001
    Table 21.5: Présentation des facteurs associés à la pratique d’un sport avec modelsummary()

    La fonction modelsummary::modelplot() permet d’afficher un graphique des coefficients.

    mod |> modelsummary::modelplot()

    Figure 21.2: Facteurs associés à la pratique d’un sport avec modelplot()

    ATTENTION : si l’on affiche les odds ratio avec exponentiate = TRUE, modelsummary::modelplot() conserve par défaut une échelle linéaire. On sera donc vigilant à appliquer ggplot2::scale_x_log10() manuellement pour utiliser une échelle logarithmique.

    mod |>
      modelsummary::modelplot(exponentiate = TRUE) +
      ggplot2::scale_x_log10()

    Figure 21.3: Odds Ratios associés à la pratique d’un sport avec modelplot()

    21.7 Afficher toutes les comparaisons (pairwise contrasts)

    Dans le tableau des résultats (Table 21.3), pour les variables catégorielles, il importe de bien garder en mémoire que chaque odds ratio doit se comparer à la valeur de référence. Ainsi, les odds ratios affichés pour chaque classe d’âges correspondent à une comparaison avec la classe d’âges de références, les 18-24 ans. La p-valeur associée nous indique quant à elle si cet odds ratio est significativement de 1, donc si cette classe d’âges données se comporte différemment de celle de référence.

    Mais cela ne nous dit nullement si les 65 ans et plus diffèrent des 45-64 ans. Il est tout à fait possible de recalculer l’odds ratio correspondant en rapport les odds ratio à la référence : \(OR_{65+/45-64}=OR_{65+/18-24}/OR_{45-64/18-24}\).

    Le package emmeans et sa fonction emmeans::emmeans() permettent de recalculer toutes les combinaisons d’odds ratio (on parle alors de pairwise contrasts) ainsi que leur intervalle de confiance et la p-valeur correspondante.

    On peut ajouter facilement5 cela au tableau produit avec gtsummary::tbl_regression() en ajoutant l’option add_pairwise_contrasts = TRUE.

  • 5 Cela nécessite néanmoins au minimum la version 1.11.0 du package broom.helpers et la version 1.6.3 de gtsummary.

  • mod |> 
      tbl_regression(
        exponentiate = TRUE,
        add_pairwise_contrasts = TRUE
      ) |> 
      bold_labels()
    Caractéristique OR1 95% IC1 p-valeur
    Sexe
        Homme / Femme 1,55 1,26 – 1,91 <0,001
    Groupe d'âges
        (25-44 ans) / (18-24 ans) 0,66 0,37 – 1,18 0,3
        (45-64 ans) / (18-24 ans) 0,34 0,18 – 0,62 <0,001
        (45-64 ans) / (25-44 ans) 0,51 0,38 – 0,70 <0,001
        65 ans et plus / (18-24 ans) 0,25 0,12 – 0,51 <0,001
        65 ans et plus / (25-44 ans) 0,38 0,24 – 0,61 <0,001
        65 ans et plus / (45-64 ans) 0,74 0,47 – 1,17 0,3
    Niveau d'études
        Secondaire / Primaire 2,59 1,51 – 4,43 <0,001
        (Technique / Professionnel) / Primaire 2,86 1,70 – 4,79 <0,001
        (Technique / Professionnel) / Secondaire 1,10 0,74 – 1,64 >0,9
        Supérieur / Primaire 6,63 3,89 – 11,3 <0,001
        Supérieur / Secondaire 2,56 1,69 – 3,88 <0,001
        Supérieur / (Technique / Professionnel) 2,32 1,61 – 3,36 <0,001
        Non documenté / Primaire 8,59 3,49 – 21,1 <0,001
        Non documenté / Secondaire 3,32 1,46 – 7,53 <0,001
        Non documenté / (Technique / Professionnel) 3,01 1,38 – 6,56 0,001
        Non documenté / Supérieur 1,30 0,58 – 2,90 >0,9
    Rapport à la religion
        Pratiquant occasionnel / Pratiquant regulier 0,98 0,57 – 1,68 >0,9
        Appartenance sans pratique / Pratiquant regulier 0,99 0,60 – 1,63 >0,9
        Appartenance sans pratique / Pratiquant occasionnel 1,02 0,68 – 1,52 >0,9
        Ni croyance ni appartenance / Pratiquant regulier 0,81 0,47 – 1,40 0,9
        Ni croyance ni appartenance / Pratiquant occasionnel 0,82 0,52 – 1,31 0,8
        Ni croyance ni appartenance / Appartenance sans pratique 0,81 0,54 – 1,21 0,7
        Rejet / Pratiquant regulier 0,68 0,30 – 1,54 0,8
        Rejet / Pratiquant occasionnel 0,70 0,33 – 1,49 0,8
        Rejet / Appartenance sans pratique 0,69 0,33 – 1,41 0,7
        Rejet / Ni croyance ni appartenance 0,85 0,40 – 1,79 >0,9
        NSP ou NVPR / Pratiquant regulier 0,92 0,29 – 2,97 >0,9
        NSP ou NVPR / Pratiquant occasionnel 0,94 0,30 – 2,92 >0,9
        NSP ou NVPR / Appartenance sans pratique 0,93 0,30 – 2,82 >0,9
        NSP ou NVPR / Ni croyance ni appartenance 1,14 0,37 – 3,55 >0,9
        NSP ou NVPR / Rejet 1,35 0,37 – 4,88 >0,9
    Heures de télévision / jour 0,89 0,83 – 0,95 <0,001
    1 OR = rapport de cotes, IC = intervalle de confiance
    Table 21.6: Facteurs associés à la pratique d’un sport (pairwise contrasts)

    De même, on peur visualiser les coefficients avec la même option dans ggstats::ggcoef_model()6. On peut d’ailleurs choisir les variables concernées avec l’argument pairwise_variables.

  • 6 Cela nécessite néanmoins au minimum la version 1.11.0 du package broom.helpers et la version 0.2.0 de ggstats.

  • mod |> 
      ggstats::ggcoef_model(
        exponentiate = TRUE,
        add_pairwise_contrasts = TRUE,
        pairwise_variables = c("groupe_ages", "etudes")
      )

    Figure 21.4: Facteurs associés à la pratique d’un sport (pairwise contrasts)

    21.8 Identifier les variables ayant un effet significatif

    Pour les variables catégorielles à trois modalités ou plus, les p-values associées aux odds ratios nous indique si un odd ratio est significativement différent de 1, par rapport à la modalité de référence. Mais cela n’indique pas si globalement une variable a un effet significatif sur le modèle. Pour tester l’effet global d’une variable, on peut avoir recours à la fonction car::Anova(). Cette dernière va tour à tour supprimer chaque variable du modèle et réaliser une analyse de variance (ANOVA) pour voir si la variance change significativement.

    car::Anova(mod)
    Analysis of Deviance Table (Type II tests)
    
    Response: sport
                LR Chisq Df Pr(>Chisq)    
    sexe          17.309  1  3.176e-05 ***
    groupe_ages   52.803  3  2.020e-11 ***
    etudes       123.826  4  < 2.2e-16 ***
    relig          4.232  5  0.5165401    
    heures.tv     13.438  1  0.0002465 ***
    ---
    Signif. codes:  0 '***' 0.001 '**' 0.01 '*' 0.05 '.' 0.1 ' ' 1

    Ainsi, dans le cas présent, la suppression de la variable relig ne modifie significativement pas le modèle, indiquant l’absence d’effet de cette variable.

    Si l’on a recours à gtsummary::tbl_regression(), on peut facilement ajouter les p-valeurs globales avec gtsummary::add_global_p()7.

  • 7 Si l’on veut conserver les p-values individuelles associées à chaque odds ratio, on ajoutera l’option keep = TRUE.

  • mod |>
      tbl_regression(exponentiate = TRUE) |>
      bold_labels() |> 
      add_global_p()
    Caractéristique OR1 95% IC1 p-valeur
    Sexe <0,001
        Femme
        Homme 1,55 1,26 – 1,91
    Groupe d'âges <0,001
        18-24 ans
        25-44 ans 0,66 0,42 – 1,03
        45-64 ans 0,34 0,21 – 0,54
        65 ans et plus 0,25 0,15 – 0,43
    Niveau d'études <0,001
        Primaire
        Secondaire 2,59 1,77 – 3,83
        Technique / Professionnel 2,86 1,98 – 4,17
        Supérieur 6,63 4,55 – 9,80
        Non documenté 8,59 4,53 – 16,6
    Rapport à la religion 0,5
        Pratiquant regulier
        Pratiquant occasionnel 0,98 0,68 – 1,42
        Appartenance sans pratique 0,99 0,71 – 1,40
        Ni croyance ni appartenance 0,81 0,55 – 1,18
        Rejet 0,68 0,39 – 1,19
        NSP ou NVPR 0,92 0,40 – 2,02
    Heures de télévision / jour 0,89 0,83 – 0,95 <0,001
    1 OR = rapport de cotes, IC = intervalle de confiance
    Table 21.7: Ajout des p-valeurs globales
    Note

    Concernant le test réalisé dans le cadre d’une Anova, il existe trois tests différents que l’on présente comme le type 1, le type 2 et le type 3 (ou I, II et III). Pour une explication sur ces différents types, on pourra se référer (en anglais) à https://mcfromnz.wordpress.com/2011/03/02/anova-type-iiiiii-ss-explained/ ou encore http://md.psych.bio.uni-goettingen.de/mv/unit/lm_cat/lm_cat_unbal_ss_explained.html.

    Le type I n’est pas recommandé dans le cas présent car il dépend de l’ordre dans lequel les différentes variables sont testées.

    Lorsqu’il n’y a pas d’interaction dans un modèle, le type II serait à privilégier car plus puissant (nous aborderons les interactions dans un prochain chapitre, cf. Chapitre 24).

    En présence d’interactions, il est conseillé d’avoir plutôt recours au type III. Cependant, en toute rigueur, pour utiliser le type III, il faut que les variables catégorielles soient codées en utilisant un contrastes dont la somme est nulle (un contrast de type somme ou polynomial). Or, par défaut, les variables catégorielles sont codées avec un contraste de type traitement (nous aborderons les différents types de contrastes plus tard, cf. Chapitre 23).

    Par défaut, car::Anova() utilise le type II et gtsummary::add_global_p() le type III. Dans les deux cas, il est possible de préciser le type de test avec type = "II" ou type = "III".

    Dans le cas de notre exemple, un modèle simple sans interaction, le type de test ne change pas les résultats.

    21.9 Sélection pas à pas d’un meilleur modèle

    Il est toujours tentant lorsque l’on recherche les facteurs associés à un phénomène d’inclure un nombre important de variables explicatives potentielles dans son modèle logistique. Cependant, un tel modèle n’est pas forcément le plus efficace et certaines variables n’auront probablement pas d’effet significatif sur la variable d’intérêt.

    Pour une présentation didactique du cadre théorique de la sélection de modèle, vous pouvez consulter en ligne le cours de L. Rouvière sur la sélection/validation de modèles.

    La technique de sélection descendante pas à pas est une approche visant à améliorer son modèle explicatif8. On réalise un premier modèle avec toutes les variables spécifiées, puis on regarde s’il est possible d’améliorer le modèle en supprimant une des variables du modèle. Si plusieurs variables permettent d’améliorer le modèle, on supprimera la variable dont la suppression améliorera le plus le modèle. Puis on recommence le même procédé pour voir si la suppression d’une seconde variable peut encore améliorer le modèle et ainsi de suite. Lorsque le modèle ne peut plus être amélioré par la suppresion d’une variable, on s’arrête.

  • 8 Il existe également des méthodes de sélection ascendante pas à pas, mais nous les aborderons pas ici.

  • Il faut également définir un critère pour déterminer la qualité d’un modèle. L’un des plus utilisés est le Akaike Information Criterion ou AIC. Plus l’AIC sera faible, meilleure sera le modèle. Il s’agit d’un compromis entre le nombre de degrés de liberté (e.g. le nombre de coefficients dans le modèle) que l’on cherche à minimiser et la variance expliquée que l’on cherche à maximiser.

    La fonction step() permet justement de sélectionner le meilleur modèle par une procédure pas à pas descendante basée sur la minimisation de l’AIC. La fonction affiche à l’écran les différentes étapes de la sélection et renvoie le modèle final.

    mod2 <- step(mod)
    Start:  AIC=2236.17
    sport ~ sexe + groupe_ages + etudes + relig + heures.tv
    
                  Df Deviance    AIC
    - relig        5   2210.4 2230.4
    <none>             2206.2 2236.2
    - heures.tv    1   2219.6 2247.6
    - sexe         1   2223.5 2251.5
    - groupe_ages  3   2259.0 2283.0
    - etudes       4   2330.0 2352.0
    
    Step:  AIC=2230.4
    sport ~ sexe + groupe_ages + etudes + heures.tv
    
                  Df Deviance    AIC
    <none>             2210.4 2230.4
    - heures.tv    1   2224.0 2242.0
    - sexe         1   2226.4 2244.4
    - groupe_ages  3   2260.6 2274.6
    - etudes       4   2334.3 2346.3

    Le modèle initial a un AIC de 2236,2. À la première étape, il apparait que la suppression de la variable religion permet diminuer l’AIC à 2210,4. Lors de la seconde étape, toute suppression d’une autre variable ferait augmenter l’AIC. La procédure s’arrête donc.

    Pour obtenir directement l’AIC d’un modèle donné, on peut utiliser la fonction AIC().

    AIC(mod)
    [1] 2236.173
    AIC(mod2)
    [1] 2230.404

    On peut effectuer une analyse de variance ou ANOVA pour comparer les deux modèles avec la fonction anova().

    anova(mod, mod2, test = "Chisq")
    Analysis of Deviance Table
    
    Model 1: sport ~ sexe + groupe_ages + etudes + relig + heures.tv
    Model 2: sport ~ sexe + groupe_ages + etudes + heures.tv
      Resid. Df Resid. Dev Df Deviance Pr(>Chi)
    1      1980     2206.2                     
    2      1985     2210.4 -5  -4.2319   0.5165

    Il n’y a pas de différences significatives entre nos deux modèles (p=0,52). Autrement dit, notre second modèle explique tout autant de variance que notre premier modèle, tout en étant plus parcimonieux.

    Astuce

    Une alternative à la fonction stats::step() est la fonction MASS::stepAIC() du package MASS qui fonctionne de la même manière. Si cela ne change rien aux régressions logistiques classiques, il arrive que pour certains types de modèle la méthode stats::step() ne soit pas disponible, mais que MASS::stepAIC() puisse être utilisée à la place.

    library(MASS)
    
    Attachement du package : 'MASS'
    L'objet suivant est masqué depuis 'package:gtsummary':
    
        select
    L'objet suivant est masqué depuis 'package:dplyr':
    
        select
    mod2bis <- stepAIC(mod)
    Start:  AIC=2236.17
    sport ~ sexe + groupe_ages + etudes + relig + heures.tv
    
                  Df Deviance    AIC
    - relig        5   2210.4 2230.4
    <none>             2206.2 2236.2
    - heures.tv    1   2219.6 2247.6
    - sexe         1   2223.5 2251.5
    - groupe_ages  3   2259.0 2283.0
    - etudes       4   2330.0 2352.0
    
    Step:  AIC=2230.4
    sport ~ sexe + groupe_ages + etudes + heures.tv
    
                  Df Deviance    AIC
    <none>             2210.4 2230.4
    - heures.tv    1   2224.0 2242.0
    - sexe         1   2226.4 2244.4
    - groupe_ages  3   2260.6 2274.6
    - etudes       4   2334.3 2346.3

    Un critère similaire à l’AIC est le critère BIC (Bayesian Information Criterion) appelé aussi SBC (Schwarz information criterion). Il s’obtient avec stats::step() en ajoutant l’argument k = log(n)n est le nombre d’observations inclues dans le modèle que l’on peut obtenir avec nrow(model.matrix(reg)) (pour tenir compte des éventuelles observations manquantes retirées des données pour le calcul du modèle).

    mod2_bic <- step(mod, k = log(nrow(model.matrix(mod))))
    Start:  AIC=2320.15
    sport ~ sexe + groupe_ages + etudes + relig + heures.tv
    
                  Df Deviance    AIC
    - relig        5   2210.4 2286.4
    <none>             2206.2 2320.2
    - heures.tv    1   2219.6 2326.0
    - sexe         1   2223.5 2329.9
    - groupe_ages  3   2259.0 2350.2
    - etudes       4   2330.0 2413.6
    
    Step:  AIC=2286.39
    sport ~ sexe + groupe_ages + etudes + heures.tv
    
                  Df Deviance    AIC
    <none>             2210.4 2286.4
    - heures.tv    1   2224.0 2292.4
    - sexe         1   2226.4 2294.8
    - groupe_ages  3   2260.6 2313.8
    - etudes       4   2334.3 2379.8

    On peut facilement comparer visuellement deux modèles avec ggstats::ggcoef_compare() de ggstats.

    library(ggstats)
    ggcoef_compare(
      list("modèle complet" = mod, "modèle réduit" = mod2), 
      exponentiate = TRUE
    )

    Figure 21.5: Comparaison visuelle des deux modèles (dodge)

    ggcoef_compare(
      list("modèle complet" = mod, "modèle réduit" = mod2), 
      type = "faceted",
      exponentiate = TRUE
    )

    Figure 21.6: Comparaison visuelle des deux modèles (faceted)

    Si l’on souhaite afficher l’AIC (ainsi que d’autres statistiques globales du modèle) en note du tableau des coefficients, on pourra utiliser gtsummary::add_glance_source_note().

    mod2 |> 
      tbl_regression(exponentiate = TRUE) |> 
      bold_labels() |> 
      add_glance_source_note()
    Caractéristique OR1 95% IC1 p-valeur
    Sexe
        Femme
        Homme 1,52 1,24 – 1,87 <0,001
    Groupe d'âges
        18-24 ans
        25-44 ans 0,68 0,43 – 1,06 0,084
        45-64 ans 0,36 0,23 – 0,57 <0,001
        65 ans et plus 0,27 0,16 – 0,46 <0,001
    Niveau d'études
        Primaire
        Secondaire 2,54 1,73 – 3,75 <0,001
        Technique / Professionnel 2,81 1,95 – 4,10 <0,001
        Supérieur 6,55 4,50 – 9,66 <0,001
        Non documenté 8,54 4,51 – 16,5 <0,001
    Heures de télévision / jour 0,89 0,83 – 0,95 <0,001
    déviance nulle = 2 609; degrés de liberté du modèle nul = 1 994; Log-likelihood = -1 105; AIC = 2 230; BIC = 2 286; Deviance = 2 210; degrés de liberté des résidus = 1 985; No. Obs. = 1 995
    1 OR = rapport de cotes, IC = intervalle de confiance
    Table 21.8: Modèle obtenu après réduction du nombre de variables

    21.10 Régressions logistiques univariées

    Les usages varient selon les disciplines et les revues scientifiques, mais il n’est pas rare de présenter, avant le modèle logistique multivarié, une succession de modèles logistiques univariés (i.e. avec une seule variable explicative à la fois) afin de présenter les odds ratios et leur intervalle de confiance et p-valeur associés avant l’ajustement multiniveau.

    Afin d’éviter le code fastidieux consistant à réaliser chaque modèle un par un (par exemple glm(sport ~ sexe, family = binomial, data = d)) puis à en fusionner les résultats, on pourra tirer partie de gtsummary::tbl_uvregression() qui permet de réaliser toutes ces régressions individuelles en une fois et de les présenter dans un tableau synthétique.

    d |>
      tbl_uvregression(
        y = sport,
        include = c(sexe, groupe_ages, etudes, relig, heures.tv),
        method = glm,
        method.args = list(family = binomial),
        exponentiate = TRUE
      ) |> 
      bold_labels()
    Caractéristique N OR1 95% IC1 p-valeur
    Sexe 2 000
        Femme
        Homme 1,47 1,22 – 1,77 <0,001
    Rapport à la religion 2 000
        Pratiquant regulier
        Pratiquant occasionnel 1,08 0,78 – 1,50 0,6
        Appartenance sans pratique 1,31 0,98 – 1,78 0,071
        Ni croyance ni appartenance 1,45 1,05 – 2,02 0,026
        Rejet 1,19 0,72 – 1,95 0,5
        NSP ou NVPR 0,93 0,44 – 1,88 0,8
    Heures de télévision / jour 1 995 0,79 0,74 – 0,84 <0,001
    Groupe d'âges 2 000
        18-24 ans
        25-44 ans 0,51 0,35 – 0,71 <0,001
        45-64 ans 0,20 0,14 – 0,28 <0,001
        65 ans et plus 0,10 0,07 – 0,15 <0,001
    Niveau d'études 2 000
        Primaire
        Secondaire 3,61 2,52 – 5,23 <0,001
        Technique / Professionnel 4,75 3,42 – 6,72 <0,001
        Supérieur 11,4 8,11 – 16,3 <0,001
        Non documenté 26,2 15,7 – 44,9 <0,001
    1 OR = rapport de cotes, IC = intervalle de confiance
    Table 21.9: Régressions logistiques univariées

    21.11 Présenter l’ensemble des résultats dans un même tableau

    La fonction gtsummary::tbl_merge() permet de fusionner plusieurs tableaux (en tenant compte du nom des variables) et donc de présenter les différents résultats de l’analyse descriptive, univariée et multivariée dans un seul et même tableau.

    tbl_desc <-
      d |> 
      tbl_summary(
        by = sport,
        include = c(sexe, groupe_ages, etudes, relig, heures.tv),
        statistic = all_categorical() ~ "{p}% ({n}/{N})",
        digits = all_categorical() ~ c(1, 0, 0)
      ) |> 
      modify_column_hide("stat_1") |> 
      modify_header("stat_2" ~ "**Pratique d'un sport**")
    
    tbl_uni <-
      d |>
      tbl_uvregression(
        y = sport,
        include = c(sexe, groupe_ages, etudes, relig, heures.tv),
        method = glm,
        method.args = list(family = binomial),
        exponentiate = TRUE
      ) |> 
      modify_column_hide("stat_n")
    
    tbl_multi <-
      mod2 |> 
      tbl_regression(exponentiate = TRUE)
    
    list(tbl_desc, tbl_uni, tbl_multi) |> 
      tbl_merge(
        tab_spanner = c(
          NA,
          "**Régressions univariées**",
          "**Régression multivariée**"
        )
      ) |> 
      bold_labels()
    Caractéristique Pratique d'un sport1 Régressions univariées Régression multivariée
    OR2 95% IC2 p-valeur OR2 95% IC2 p-valeur
    Sexe
        Femme 49,0% (354/723)
        Homme 51,0% (369/723) 1,47 1,22 – 1,77 <0,001 1,52 1,24 – 1,87 <0,001
    Groupe d'âges
        18-24 ans 15,4% (111/723)
        25-44 ans 48,0% (347/723) 0,51 0,35 – 0,71 <0,001 0,68 0,43 – 1,06 0,084
        45-64 ans 28,2% (204/723) 0,20 0,14 – 0,28 <0,001 0,36 0,23 – 0,57 <0,001
        65 ans et plus 8,4% (61/723) 0,10 0,07 – 0,15 <0,001 0,27 0,16 – 0,46 <0,001
    Niveau d'études
        Primaire 6,9% (50/723)
        Secondaire 16,2% (117/723) 3,61 2,52 – 5,23 <0,001 2,54 1,73 – 3,75 <0,001
        Technique / Professionnel 29,9% (216/723) 4,75 3,42 – 6,72 <0,001 2,81 1,95 – 4,10 <0,001
        Supérieur 35,3% (255/723) 11,4 8,11 – 16,3 <0,001 6,55 4,50 – 9,66 <0,001
        Non documenté 11,8% (85/723) 26,2 15,7 – 44,9 <0,001 8,54 4,51 – 16,5 <0,001
    Rapport à la religion
        Pratiquant regulier 11,6% (84/723)
        Pratiquant occasionnel 20,3% (147/723) 1,08 0,78 – 1,50 0,6
        Appartenance sans pratique 39,7% (287/723) 1,31 0,98 – 1,78 0,071
        Ni croyance ni appartenance 22,1% (160/723) 1,45 1,05 – 2,02 0,026
        Rejet 4,6% (33/723) 1,19 0,72 – 1,95 0,5
        NSP ou NVPR 1,7% (12/723) 0,93 0,44 – 1,88 0,8
    Heures de télévision / jour 2,00 (1,00 – 3,00) 0,79 0,74 – 0,84 <0,001 0,89 0,83 – 0,95 <0,001
        Manquant 3
    1 % (n/N); Médiane (EI)
    2 OR = rapport de cotes, IC = intervalle de confiance
    Table 21.10: tableau synthétique de l’analyse

    Le diaporama ci-dessous vous permet de visualiser chaque étape du code correspondant au graphique précédent.

    21.12 webin-R

    La régression logistique est présentée sur YouTube dans le webin-R #06 (régression logistique (partie 1) et le le webin-R #07 (régression logistique (partie 2).